Voici quelques éléments d'optique tirés du quotidien du photographe et de l'astronome. Il s'agit du principe de fonctionnement d'un téléobjectif, d'un doubleur de focale, d'un zoom et d'un objectif catadioptrique (ou télescope de Cassegrain). On suppose que le lecteur conaît la théorie des lentilles minces.
Dans tous les exemples ci-dessous, on considère que l'objet est à l'infini. Ceci est toujours vrai en astronomie et est rarement très faux en photographie, les objectifs photographiques ordinaires ayant toujours une distance minimale de mise au point de l'ordre de dix fois leur distance focale.
Si on regarde bien, tous ces exemples se ressemblent : on explore les deux façons possibles de réaliser un objectif avec une lentille convergente et une lentille divergente. Si on met la lentille convergente en amont, on obtient un montage de type téléobjectif, qu'on retrouve dans le doubleur de focale et dans le télescope Cassegrain. Si on la met en aval, on obtient un montage rétrofocus qui est utilisé dans les grands angulaires pour reflex, ainsi que dans certains zooms.
Attribuer une distance focale à un système optique composite ne semble pas simple si on ne connaît pas le formalisme des systèmes épais (plans principaux, etc.) Il existe pourtant une façon simple de procéder : il suffit, au signe près, de considérer un objet à l'infini et de diviser la taille (linéaire) de son image par celle (angulaire) de l'objet en question. On peut facilement se convaincre que :
Le choix de la focale d'un objectif se fait en fonction de la taille du sujet et de la distance à laquelle on peut raisonnablement s'approcher. Pour la photo animalière ou sportive, les photographes doivent souvent avoir recours à des objectifs de longue focale. Si ces objectifs avaient une construction optique simple, ils seraient très encombrants, puisque leur tube optique devrait avoir une longueur de l'ordre de la distance focale. Pour rendre les objectifs plus maniables, on a recours à la construction de type téléobjectif illustrée ci-dessous.
L'assemblage d'une lentille convergente L1 et d'une lentille divergente L2 permet d'obtenir l'équivalent de la lentille L' de la figure. Cette équivalence peut s'entendre de deux façons :
Les grands fabricants d'équipement photo reflex proposent chacun un « système », c'est à dire un ensemble de boîtiers et d'objectifs compatibles. Cette compatibilité est assurée par l'adoption d'une monture commune (platine permettant d'assembler le boîtier et l'objectif), et par la standardisation de la distance monture-film, qu'on appelle tirage optique (noté t). Tous les boîtiers présentent donc leur monture à la distance t du plan-film. Tous les objectifs sont prévus pour donner une image à la distance t de leur monture.
Un convertisseur de focale est un système optique pourvu de deux montures qui s'insère entre le boîtier et l'objectif. Il grossit l'image donnée par l'objectif et permet ainsi d'obtenir une focale équivalente plus grande. Le facteur de grossissement, qui est aussi le facteur par lequel la focale est multipliée, est variable. Les convertisseurs les plus courants offrent un facteur de x2 et sont pour cette raison simplement appelés doubleurs. On rencontre fréquemment aussi des convertisseurs x1,4.
L'épaisseur e du doubleur est un paramètre important : c'est la distance qu'il y aura entre l'image donnée par l'objectif en amont et le plan film. On peut modéliser le doubleur comme une lentille mince divergente au milieu de cette épaisseur. Son objet est l'image formée par la lentille, il se trouve à la distance t-e/2 (objet virtuel). Son image doit se trouver sur le plan film, c'est à dire à la distance t+e/2. Ces deux distances permettent de calculer la focale de la lentille en fonction de t et e.
Le grossissement obtenu est le rapport entre la distance à l'image et la distance à l'objet, soit (t+e/2)/(t-e/2). Pour que le convertisseur soit un doubleur, il faut donc que e=2t/3.
On peut considérer qu'un téléobjectif n'est rien d'autre qu'un objectif avec un convertisseur intégré.
Pour couvrir des champs larges, le photographe utilise des objectifs de courte focale. Cependant, dans un boîtier reflex, il n'est pas possible de placer des lentille arbitrairement près du film, car devant celui-ci se trouve la cage du miroir (miroir escamotable servant à la visée). Le montage ci-dessous, connu comme rétrofocus, permet de rendre les courtes focales compatibles avec la visée reflex. Ce système a participé au succès des systèmes à visée reflex (années 50/60, je crois).
De même que dans le cas du téléobjectif, nous avons ici un système de deux lentilles L1L2 qui est équivalent à une seule lentille L' (de courte focale cette fois-ci). Comme précédemment, l'équivalence s'entend au sens du plan principal image, ou de l'image obtenue d'un sujet à l'infini.
La focale équivalente est la distance L'P. Elle est plus courte que la distance L2P entre la lentille arrière et le film. ce qui laisse la place pour la cage du miroir.
Un des autres éléments qui ont contribué au succès des reflex est le zoom, ou objectif à focale variable. Il permet de régler en continu la largeur du cadrage en « zoomant » à l'aide d'une bague. Il est resté longtemps réservé aux reflex car leur montage sur d'autres appareils nécessite d'avoir en fait deux zooms : un en guise d'objectif et un autre dans le viseur. La visée reflex se faisant directement à travers l'objectif de prise de vue, le problème de couplage des deux zooms ne se pose pas.
Le montage rétrofocus sert de base à la construction de certains zooms, typiquement ceux de focale moyenne ou courte. Ceci est généralement fait à partir d'un montage « 4f ».
Soit une lentille simple convergente de focale f qui donne une image réelle d'un sujet réel. Quelle est la plus petite distance possible entre le sujet et l'image ? La réponse est 4f, et cette situation est obtenue lorsque l'objet et l'image sont disposés symétriquement à la distance 2f de chaque côté de la lentille.
Supposons maintenant que la distance x entre l'objet et la lentille varie légèrement autour de la valeur 2f. Comment va varier la distance x' qu'il y a entre la lentille et l'image ? En fait, comme le montage 4f réalise le minimum de x + x', cette somme est constante au premier ordre des variations de x. Ça veut dire que, toujours au premier ordre, x' = 4f - x. On peut donc déplacer légèrement la lentille sans que la position de l'objet et de l'image ne changent sensiblement.
Et que devient le grossissement ? Il vaut -x'/x est n'est donc pas constant au premier ordre. Ça veut dire qu'en déplaçant légèrement la lentille autour d'un montage 4f, on réalise un système à grossissement variable où les positions de l'objet et de l'image sont presque fixes.
Les zooms rétrofocus sont basés sur ce principe. Dans un tel objectif, une lentille divergente L1 donne une image virtuelle à distance finie du sujet. Cette image sert d'objet réel à une lentille convergente L2 en position 4f.
La focale équivalente de cet objectif est égale au produit de la focale de L1 par le grossissement variable -x'/x. Dans un vrai objectif, le déplacement de L2 est trop grand pour qu'on puisse négliger les variations de x + x'. Pour tenir compte de ceci, la lentille L1 doit aussi se déplacer afin de maintenir l'image sur le film P.
Quand on tourne la bague du zoom d'un tel objectif, on constate effectivement que la lentille avant bouge. L'objectif se « rallonge » quand la bague est tournée vers les focales extrêmes. Il trouve sa longueur minimale dans une focale intermédiaire. Ceci traduit simplement le fait que le montage 4f minimise x + x'. Le mouvement est réalisé à l'aide de cames, ce qui rend l'objectif plus complexe à réaliser qu'une focale fixe dont le mouvement (de mise au point) est réalisé par un simple pas de vis.
Il existe d'autres zooms (en général ceux de longue focale) qui s'allongent de façon monotone quand on zoome. Ceux-ci reposent sur un montage optique différent, probablement de type téléobjectif.
C'est une variante du montage téléobjectif dans laquelle on a remplacé les lentilles par des miroirs : un miroir convergent parabolique et un miroir divergent hyperbolique. Il existe aussi des objectifs photographiques (dits catadioptriques, ou « à miroirs ») qui utilisent le montage Cassegrain. La forme des miroirs est choisie pour réaliser un stigmatisme rigoureux au centre du champ. Dans le cadre de l'optique de Gauss, il est équivalent de prendre des miroirs sphériques, mais on a alors seulement un stigmatisme approché.
Avec un télescope, on n'a plus à se justifier pour considérer que l'objet est à l'infini... Le miroir primaire M1 donne de l'objet à l'infini une image au foyer primaire F1. Le miroir secondaire M2 donne de cette image une nouvelle image au foyer secondaire F2 situé derrière M1. Le miroir primaire est percé en son centre afin de récupérer cette image dans un oculaire (ou sur un film photographique).
On pourrait dessiner la lentille équivalente à ce montage, mais il faudrait une figure beaucoup plus grande : il faut prolonger les rayons qui partent de M2 jusqu'à ce qu'ils rejoignent ceux qui arrivent dans M1. On voit donc que la focale équivalente est très longue.
Comme pour le téléobjectif, le principal avantage de ce montage est sa compacité. En comparaison, un télescope en monture Newton a toujours une longueur totale de l'ordre de sa distance focale. Les Cassegrain sont donc appréciés des astronomes amateurs qui peuvent ainsi transporter dans leur coffre des instruments de grande focale. Les télescopes géants sont souvent aussi en configuration Cassegrain car cela limite la longueur et le poids de l'instrument.
Un autre petit avantage des Cassegrain est que l'image se forme derrière l'instrument, et non sur le côté comme dans un Newton. Leur utilisation est donc un peu plus intuitive.
Edgar Bonet <webmaster@edg...>. |